Case number | CAC-ADREU-005450 |
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Time of filing | 2009-07-03 09:23:55 |
Domain names | nobilia.eu |
Case administrator
Name | Tereza Bartošková |
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Complainant
Organization / Name | Nobilia-Werke J. Stickling GmbH & Co. KG |
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Respondent
Organization / Name | Aristides Safarikas |
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Complétez les informations sur les autres procédures judiciaires, qui selon les information du Tribunal sont en cours ou ont été jugées, et qui concernent le nom de Domaine litigieux.
Le Centre d’arbitrage ADR avait été saisie d'une procédure ADR (affaire n° 00761) dont la décision a été rendue le 21 août 2006 et est devenue définitive.
Situation de fait
Le Requérant, la société Nobilia Werke J. Stickling GmbH & Co. KG. ("Nobilia Werke") est titulaire de nombreux enregistrements de la marque NOBILIA déposés dans les pays européens ainsi qu'au plan international, mais également de plusieurs réservations de noms de domaine <nobilia> sous les extensions nationales (.de, .fr, .co.uk, entre autres) ou génériques (.com, .org, entre autres).
Sur ces bases, "Nobilia Werke" a déposé une requête devant le Centre d'arbitrage ADR le 30 juin 2009 pour solliciter, conformément à l’article B 11 (b) des règles ADR, la révocation du nom du domaine contesté, <nobilia.eu>, ainsi que le transfert à son profit. La requête a été enregistrée le 3 juillet 2009, après vérification de la réception du paiement de la taxe correspondante, et il lui a été affecté le n° 05450.
Le Centre d'arbitrage ADR, après avoir vérifié la recevabilité de la plainte, l'a transmise à la partie défendante, M. Aristides Safarikas. Ce dernier a, dans le délai imparti, déposer une réponse à la plainte par laquelle il réfute les arguments de la partie requérante et requiert le rejet de la plainte.
Le 20 août 2009, le Centre d'arbitrage ADR a nommé l'arbitre unique à qui le dossier à été transmis le 24 août 2009, aucune contestation de cette nomination n'ayant été reçue de l'une ou l'autre des parties.
Le 4 septembre 2009, "Nobilia Werke" a déposé, conformément à l’article 4 (b) des règles d’ADR, une demande de suspension de procédure pour une période de deux mois en précisant que les parties "ont entamé des séances de conciliation" pour trouver une issue amiable à l'affaire en cause.
Le 7 septembre 2009, la partie défendante a indiqué au Centre d'arbitrage ADR qu'elle n'avait connaissance d'aucune séance de conciliation.
Compte tenu de ces éléments, l'arbitre a rendu une décision rejetant la demande de suspension de procédure en date du 12 septembre 2009.
Le 15 septembre 2009, deux "communication atypiques" ont été reçues par le Centre d'arbitrage ADR de la part de "Nobilia Werke" par lesquelles elle vient contester les arguments déposés par la partie défendante dans sa réponse à requête.
Le 16 septembre 2009 M.Aristides Safarikas, la partie défendante, réitère son argumentation et évoque les attitudes dilatoires de la "Nobilia Werke".
Le 20 septembre 2009 M.Aristides Safarikas a déposé une nouvelle « communication atypique » contestant à nouveau l’argumentation de la partie requérante et plus particulièrement au regard de la notion de mauvaise fois déduite de la non-exploitation d’un domaine.
Sur ces bases, "Nobilia Werke" a déposé une requête devant le Centre d'arbitrage ADR le 30 juin 2009 pour solliciter, conformément à l’article B 11 (b) des règles ADR, la révocation du nom du domaine contesté, <nobilia.eu>, ainsi que le transfert à son profit. La requête a été enregistrée le 3 juillet 2009, après vérification de la réception du paiement de la taxe correspondante, et il lui a été affecté le n° 05450.
Le Centre d'arbitrage ADR, après avoir vérifié la recevabilité de la plainte, l'a transmise à la partie défendante, M. Aristides Safarikas. Ce dernier a, dans le délai imparti, déposer une réponse à la plainte par laquelle il réfute les arguments de la partie requérante et requiert le rejet de la plainte.
Le 20 août 2009, le Centre d'arbitrage ADR a nommé l'arbitre unique à qui le dossier à été transmis le 24 août 2009, aucune contestation de cette nomination n'ayant été reçue de l'une ou l'autre des parties.
Le 4 septembre 2009, "Nobilia Werke" a déposé, conformément à l’article 4 (b) des règles d’ADR, une demande de suspension de procédure pour une période de deux mois en précisant que les parties "ont entamé des séances de conciliation" pour trouver une issue amiable à l'affaire en cause.
Le 7 septembre 2009, la partie défendante a indiqué au Centre d'arbitrage ADR qu'elle n'avait connaissance d'aucune séance de conciliation.
Compte tenu de ces éléments, l'arbitre a rendu une décision rejetant la demande de suspension de procédure en date du 12 septembre 2009.
Le 15 septembre 2009, deux "communication atypiques" ont été reçues par le Centre d'arbitrage ADR de la part de "Nobilia Werke" par lesquelles elle vient contester les arguments déposés par la partie défendante dans sa réponse à requête.
Le 16 septembre 2009 M.Aristides Safarikas, la partie défendante, réitère son argumentation et évoque les attitudes dilatoires de la "Nobilia Werke".
Le 20 septembre 2009 M.Aristides Safarikas a déposé une nouvelle « communication atypique » contestant à nouveau l’argumentation de la partie requérante et plus particulièrement au regard de la notion de mauvaise fois déduite de la non-exploitation d’un domaine.
A. Partie Requérante
La partie requérante, "Nobilia Werke" se présente comme "une entreprise aux dimensions internationales, fondée en 1945 dont le chiffre d’affaires annuel s’élève à 706,5 millions d’euros. [Elle] est connue tant en Europe que dans le monde entier en tant que fabricant de cuisines de qualité supérieure". Elle précise "[... être] titulaire de nombreuses marques, en particulier de la marque verbale "Nobilia", lesquelles sont enregistrées auprès de l’Office allemand des brevets et des marques sous les numéros d’enregistrement 953420 et 983688. De plus, ces marques sont enregistrées au niveau international dans toute l’Europe pour de nombreux pays."
La partie requérante mentionne être connue en Allemagne et dans toute l’Europe sous le nom "Nobilia".
La partie requérante exploite depuis longtemps de nombreux sites Internet au travers de divers noms de domaine "nobilia", par exemple <nobilia.de, <nobilia.de>, <nobilia.com>, <nobilia.fr>, <nobilia.co.uk>, <nobilia.at>, <nobilia.be>, <nobilia.dk>, <nobilia.es>, <nobilia.fi>, <nobilia.ir>, <nobilia.jp>, <nobilia.net>, <nobilia.org>, <nobilia.se>, <nobilia.us>, <nobilia.ch>.
"Nobilia Werke" précise qu’une procédure ADR antérieure, référencée ADR 00761, ne lui avait pas donné gain de cause au motif que "[La] demande d’enregistrement correspondante avait été déposée antérieurement à celle de la partie requérante ["nobilia Werke"].
"Nobilia Werke", en indiquant que le domaine contesté, <nobilia.eu>, est identique à leur marque, articule son argumentation sur le fait que la partie défendante avait connaissance de l’existence de ses enregistrements de marque et qu’elle n’avait pas exploité le nom de domaine contesté sur une période de plus de deux années. Cette non exploitation constitue la preuve d’un enregistrement de mauvaise foi au sens des dispositions de l’article 21 §1 b) et §3 b) ii) du règlement CE 874/2004.
"Nobilia Werke" s’appuie également sur la doctrine allemande qui considère que, selon :
- "Bettinger, tous les noms de domaine à l’égard desquels le titulaire du domaine peut faire valoir un droit établi par un droit national ou communautaire , sont aussi soumis en l’occurrence à l’obligation d’utiliser le nom du domaine au plus tard dans les deux années qui suivent l’enregistrement";
- "Tipping (Das Recht der .eu-Domains (Le droit du domaine .eu), point 160) [le blocage] d’un domaine est indiquée lorsque le nom de domaine n’a pas été utilisé de façon pertinente pendant les deux années au moins qui suivent l’enregistrement. Ce n’est pas l'intention subjective du titulaire du domaine à vouloir aussi bloquer réellement le domaine qui compte";
- "Schafft aussi (Streitigkeiten über .eu-Domains (Litiges concernant le domaine .eu), GRUR 2004, 986) donne comme exemple de mauvaise foi pour l’enregistrement ou pour l’utilisation d’un domaine le cas où un domaine n’est lui non plus toujours pas utilisé de façon pertinente dans les deux ans qui suivent son enregistrement."
Elle conclue à la révocation du domaine et au transfert à son profit, elle même remplissant les conditions d’octroi du domaine au regard des règles ADR.
La partie requérante mentionne être connue en Allemagne et dans toute l’Europe sous le nom "Nobilia".
La partie requérante exploite depuis longtemps de nombreux sites Internet au travers de divers noms de domaine "nobilia", par exemple <nobilia.de, <nobilia.de>, <nobilia.com>, <nobilia.fr>, <nobilia.co.uk>, <nobilia.at>, <nobilia.be>, <nobilia.dk>, <nobilia.es>, <nobilia.fi>, <nobilia.ir>, <nobilia.jp>, <nobilia.net>, <nobilia.org>, <nobilia.se>, <nobilia.us>, <nobilia.ch>.
"Nobilia Werke" précise qu’une procédure ADR antérieure, référencée ADR 00761, ne lui avait pas donné gain de cause au motif que "[La] demande d’enregistrement correspondante avait été déposée antérieurement à celle de la partie requérante ["nobilia Werke"].
"Nobilia Werke", en indiquant que le domaine contesté, <nobilia.eu>, est identique à leur marque, articule son argumentation sur le fait que la partie défendante avait connaissance de l’existence de ses enregistrements de marque et qu’elle n’avait pas exploité le nom de domaine contesté sur une période de plus de deux années. Cette non exploitation constitue la preuve d’un enregistrement de mauvaise foi au sens des dispositions de l’article 21 §1 b) et §3 b) ii) du règlement CE 874/2004.
"Nobilia Werke" s’appuie également sur la doctrine allemande qui considère que, selon :
- "Bettinger, tous les noms de domaine à l’égard desquels le titulaire du domaine peut faire valoir un droit établi par un droit national ou communautaire , sont aussi soumis en l’occurrence à l’obligation d’utiliser le nom du domaine au plus tard dans les deux années qui suivent l’enregistrement";
- "Tipping (Das Recht der .eu-Domains (Le droit du domaine .eu), point 160) [le blocage] d’un domaine est indiquée lorsque le nom de domaine n’a pas été utilisé de façon pertinente pendant les deux années au moins qui suivent l’enregistrement. Ce n’est pas l'intention subjective du titulaire du domaine à vouloir aussi bloquer réellement le domaine qui compte";
- "Schafft aussi (Streitigkeiten über .eu-Domains (Litiges concernant le domaine .eu), GRUR 2004, 986) donne comme exemple de mauvaise foi pour l’enregistrement ou pour l’utilisation d’un domaine le cas où un domaine n’est lui non plus toujours pas utilisé de façon pertinente dans les deux ans qui suivent son enregistrement."
Elle conclue à la révocation du domaine et au transfert à son profit, elle même remplissant les conditions d’octroi du domaine au regard des règles ADR.
B. Partie Défendante
M. Aristides Safarikas, en réponse à la plainte déposée, indique qu’il a procédé à l’enregistrement du signe "Nobilia" à titre de marque au registre du Benelux le 25 janvier 1996, marque enregistrée sous le numéro 0584557. Cet enregistrement a fait l’objet d’une déclaration de renouvellement en 2006. La partie défendante précise que "ce dépôt est antérieur à la marque internationale de la Requérante et que ce dépôt est intervenu bien avant (pratiquement 10 ans avant) le lancement des noms de domaines <.eu> en décembre 2005".
Il précise, par ailleurs, que ce n’est que quatre mois après sa propre demande de réservation faite lors de la période "sunrise" que la partie requérante a elle même déposé son dossier de réservation. La règle du "premier arrivé, premier servi" a justement été appliquée, ce qui a été confirmé par la décision ADR n° 00761.
En outre, la partie défendante mentionne que "[sa] propre volonté s’est traduite à l’origine par un dépôt bien avant celui de la partie Requérante. De plus, les règles ADR ne tiennent absolument pas compte de la taille respective des parties comme un critère d’attribution du nom de domaine".
S’agissant de la prétendue non utilisation du domaine <nobilia.eu>, la partie défendante rétorque que "le simple fait que la capture d’écran ne montre pas de contenu à la page www.nobilia.eu ne veut pas dire qu’aucun contenu n’est déposé et que le domaine n’est pas utilisé. […] Un domaine a plusieurs utilisations possibles, un site web public, un extranet privé (à une adresse différente de celle du root du nom de domaine) ou encore une utilisation comme serveur POP et SMTP de courrier électronique".
Elle conclue donc qu’il est "difficile de contester que le domaine <nobilia.eu> est utilisé et ce depuis longue date" et que la plainte doit être rejetée d’autant qu’elle est titulaire de droit sur le signe "nobilia".
Il précise, par ailleurs, que ce n’est que quatre mois après sa propre demande de réservation faite lors de la période "sunrise" que la partie requérante a elle même déposé son dossier de réservation. La règle du "premier arrivé, premier servi" a justement été appliquée, ce qui a été confirmé par la décision ADR n° 00761.
En outre, la partie défendante mentionne que "[sa] propre volonté s’est traduite à l’origine par un dépôt bien avant celui de la partie Requérante. De plus, les règles ADR ne tiennent absolument pas compte de la taille respective des parties comme un critère d’attribution du nom de domaine".
S’agissant de la prétendue non utilisation du domaine <nobilia.eu>, la partie défendante rétorque que "le simple fait que la capture d’écran ne montre pas de contenu à la page www.nobilia.eu ne veut pas dire qu’aucun contenu n’est déposé et que le domaine n’est pas utilisé. […] Un domaine a plusieurs utilisations possibles, un site web public, un extranet privé (à une adresse différente de celle du root du nom de domaine) ou encore une utilisation comme serveur POP et SMTP de courrier électronique".
Elle conclue donc qu’il est "difficile de contester que le domaine <nobilia.eu> est utilisé et ce depuis longue date" et que la plainte doit être rejetée d’autant qu’elle est titulaire de droit sur le signe "nobilia".
Débats et constatations
1. Sur la procédure :
A titre liminaire, il est rappelé que, conformément aux dispositions du point B §8 des règles ADR, il appartient à l'arbitre de retenir ou non, à sa seule discrétion, les communications complémentaires de la plainte ou de la réponse à la plainte.
Les parties à l’affaire ont l’une et l’autre procédé à des commentaires complémentaires et au développement d’éléments factuels. Il peut être considéré en l’espèce que le principe du contradictoire a été respecté.
L’arbitre estime, d’autant que les arguments avaient déjà étaient exposés de manière similaire, tant dans la plainte que dans la réponse à cette dernière, que ces documents peuvent être acceptés et pris en considération.
2. Le nom de domaine est-il identique aux droits antérieurs invoqués par la requérante ?
Il est indiscutable que le nom de domaine contesté <nobilia.eu> est identique à la marque et aux noms de domaine NOBILIA détenus par la partie requérante.
3. La partie défendante a t-elle un intérêt ou un droit légitime sur le signe NOBILIA ?
La partie défendante est titulaire d’un enregistrement national Benelux de la marque NOBILIA, dont les droits remontent à 1996, pour désigner notamment en classe 9 des "ordinateurs personnels et appareils périphériques". Il s’agit d’un droit reconnu conformément aux dispositions de l’article 10 (1) du Règlement CE 874/2004.
Nous rappellerons que la partie requérante est titulaire d’enregistrements de la marque NOBILIA pour désigner, en classe 20, des "meubles de cuisines".
Dans la présente affaire, les parties ne sont pas des concurrents et possèdent toutes les deux un droit et intérêt légitime sur le nom NOBILIA.
4. L’enregistrement de mauvaise foi du domaine «<nobilia.eu>.
4.1. Remarques liminaires au regard de l’article 21 (3) b) ii) du Règlement CE N° 874/2004
La plainte est fondée sur l’article 21 (3) b) ii) du Règlement CE N° 874/2004 qui dispose qu’un des éléments démontrant la mauvaise foi peut être que :
"le nom de domaine n'ait pas été utilisé d'une façon pertinente dans les deux années au moins qui suivent la date d'enregistrement".
Cette disposition doit être appréciée en relation avec les termes de l’article 21 (1) précisant que "un nom de domaine est révoqué dans le cadre d’une procédure extrajudiciaire ou judiciaire appropriée, quand un nom de domaine enregistré est identique ou susceptible d'être confondu avec un nom sur lequel un droit est reconnu ou établi par le droit national et/ou communautaire, tel que les droits mentionnés à l'article 10, paragraphe 1, et que ce nom de domaine:
a) a été enregistré sans que son titulaire ait un droit ou intérêt légitime à faire valoir sur ce nom, ou
b) a été enregistré ou utilisé de mauvaise foi."
La réalisation d’un seul de ces critères pris individuellement est suffisant, ce qui constitue l’une des principales caractéristiques des procédures ADR et la distingue des procédures en application des règles de la Uniform Domain Name Dispute Resolution Policy (UDRP) pour les domaines génériques.
Dans l’hypothèse où la partie défendante n’a pas d’intérêt ou de droit légitime, le transfert du nom de domaine contesté peut être ordonné sans qu’il soit nécessaire de déterminer s’il existe ou non un usage pertinent du domaine. Aussi, il en est déduit que l’article 21 (3) b) ii) s’applique, que la partie défendante ai ou non un intérêt ou un droit légitime.
Cette thèse a été reprise dans le cadre de deux décisions du Centre d’arbitrage ADR à savoir <haug.eu> and <boltze.eu> (ADR décisions n° 05208 and n° 05231) où malgré l’existence de droits reconnus par le droit national détenu par les parties défendantes, le transfert des noms de domaine à été ordonné pour "défaut d’exploitation pendant au moins deux ans après leur enregistrement".
Dans l’affaire <Haug.eu>, la partie défendante n’avait mis en ligne qu’une simple page "ouverture prochaine" ("coming soon") et utilisait une adresse de courriel privée.
Elle n’a toutefois pas apporté la preuve d’un usage effectif et réel ne présentant qu’un seul courriel de "spam". Le Centre d’arbitrage a donc conclu à l’absence d’exploitation et ordonné le transfert du domaine.
Dans l’affaire <boltze.eu>, les faits étaient quasi identiques. L’absence d’exploitation a été confortée par la non utilisation d’adresses de courriel.
Dans une troisième affaire, l’affaire <precitec.eu> (Décision ADR n° 05266), le Tribunal indique que l’intervention de la linguistique dans l’application de l’article 21 (3) b) ii) pourrait expliquer l’interprétation stricte de cet article. En effet, dans le cadre des procédures <haug.eu> et <boltze.eu>, la langue utilisée est l’allemand. Or, les règles ADR en langue allemande diffèrent de celles en langue française ou anglaise. Pour la première "la mauvaise foi est démontrée"… et pour les deux autres, "la mauvaise fois peut être démontrée (may be demonstrated)".
La langue de procédure de la présente affaire est la langue française et par conséquent la décision du tribunal est prise sur la base de la version française des règles ADR.
Cependant, il convient de noter que ce texte, quel qu’en soit la langue, doit être interprété à la lueur des dispositions des règlements CE n° 733/2002 et CE n° 874/2004.
L’esprit des textes susvisés est la lutte contre les enregistrements frauduleux pour la protection des titulaires de droits protégés par les droits nationaux ou communautaire.
Reconnaître que l’absence d’utilisation pertinente d’un nom de domaine suffit pour obtenir le transfert dudit nom de domaine, d’autant plus que la partie défendante démontre détenir un intérêt ou un droit légitime, reviendrait à dire qu’il y existe une obligation d’usage attaché à un nom de domaine. Or, cette condition ne ressort d’aucun des textes précités si ce n’est dans le cadre d’enregistrements spéculatifs et abusifs.
En outre, si une telle obligation d’usage était établie, cela aurait un impact significatif pour les titulaires de domaine sous l’extension ".eu" y compris pour les titulaires de droits reconnus comme tels par les droits nationaux et la droit communautaire, qui n’exploitent pas nécessairement leur domaine au sens défini dans les affaires <haug.eu> et <boltze.eu>.
4.2 La partie défendant a t-elle enregistré le nom de domaine contesté de mauvaise foi ?
La partie requérante a fourni au Centre d’arbitrage ADR une copie d’écran datée du 15 juin 2009 pour démontrer l’absence de site web attaché au domaine contesté.
Si la partie requérante n’apporte pas de preuve irréfutable que le domaine <nobilia.eu> n’a pas été exploité au cours des deux années qui ont suivi l’enregistrement dudit domaine, mais uniquement à la date du 15 juin 2009, la partie défendante ne conteste pas l’absence de site web.
En revanche, la partie défendante apporte plusieurs éléments montrant un usage régulier du domaine <nobilia.eu> notamment par la présentation d’une page d’accès à un serveur de messagerie distant dit webmail sur une longue période selon ses dire mais remontant au moins à fin 2008 sur les documents fournis.
S’il apparaît pour l’internaute moyen qu’un nom de domaine se limite à une ou plusieurs pages web présentant des produits ou services d’une entreprises, il n’en demeure pas moins vrai qu’un nom de domaine peut être utilisé pour d’autres fonctions techniques qu’il permet. Ces fonctions peuvent être notamment l’utilisation d’un service de messagerie électronique, une accès sécurisé limité à certaine catégorie de personnes, ou encore un intranet réservé à une communauté précise (par exemple les salariés d’une entreprise). Dans une telle hypothèse le nom de domaine bien que non visible par l’ensemble des internautes doit être considéré comme étant exploité. Il va sans dire que l’exploitation "réservée" doit être démontrée comme a pu le faire la partie défendante dans le cas d’espèce.
L’arbitre estime que l’article 21 (3) b) ii) doit être apprécié au regard de sa rédaction précise à savoir que l’absence d’exploitation peut être une indication de mauvaise foi s’entend dans un contexte où le nom de domaine a été enregistré ou acquis "principalement pour vendre, louer ou transférer d'une autre façon le nom de domaine au titulaire d'un nom sur lequel un droit est reconnu ou établi par le droit national et/ou communautaire, ou à un organisme public", ou "le nom de domaine a été enregistré pour empêcher le titulaire d'un nom sur lequel un droit est reconnu ou établi par le droit national et/ou communautaire, ou un organisme public". Il appartient donc à la partie requérante d’apporter la preuve d’un tel enregistrement ou acquisition.
Or, dans le cas d’espèce, une telle preuve n’est pas apportée par la partie requérante qui limite sa démonstration à la non-exploitation du nom de domaine.
Si la partie défendante est informée des droits de la partie requérante depuis au moins 2006 (date de la première plainte déposée), il reste que les enregistrements de marque de chacune des parties visent des produits différents (ordinateurs, d’un côté, et meubles de cuisine, d’un autre côté). Les deux parties ne sont donc pas concurrentes, au vu des éléments fournis au Centre d’arbitrage ADR.
Il apparaît que la partie défendante n’a pas eu pour intention de vendre, louer ou transférer le nom de domaine contesté ou encore pour seul but d’empêcher la partie requérante d’utiliser ledit nom de domaine.
En conclusion, si la preuve d’une non-exploitation au cours d’une période de deux années d’un nom de domaine peut être une preuve cela ne peut être qu’une indication de mauvaise foi dans un faisceau d’indices. Il appartient à la partie requérante de démontrer en premier lieu la volonté de la partie défendant de perturber son activité. Ce qui n’est pas le cas dans la présente affaire.
A titre liminaire, il est rappelé que, conformément aux dispositions du point B §8 des règles ADR, il appartient à l'arbitre de retenir ou non, à sa seule discrétion, les communications complémentaires de la plainte ou de la réponse à la plainte.
Les parties à l’affaire ont l’une et l’autre procédé à des commentaires complémentaires et au développement d’éléments factuels. Il peut être considéré en l’espèce que le principe du contradictoire a été respecté.
L’arbitre estime, d’autant que les arguments avaient déjà étaient exposés de manière similaire, tant dans la plainte que dans la réponse à cette dernière, que ces documents peuvent être acceptés et pris en considération.
2. Le nom de domaine est-il identique aux droits antérieurs invoqués par la requérante ?
Il est indiscutable que le nom de domaine contesté <nobilia.eu> est identique à la marque et aux noms de domaine NOBILIA détenus par la partie requérante.
3. La partie défendante a t-elle un intérêt ou un droit légitime sur le signe NOBILIA ?
La partie défendante est titulaire d’un enregistrement national Benelux de la marque NOBILIA, dont les droits remontent à 1996, pour désigner notamment en classe 9 des "ordinateurs personnels et appareils périphériques". Il s’agit d’un droit reconnu conformément aux dispositions de l’article 10 (1) du Règlement CE 874/2004.
Nous rappellerons que la partie requérante est titulaire d’enregistrements de la marque NOBILIA pour désigner, en classe 20, des "meubles de cuisines".
Dans la présente affaire, les parties ne sont pas des concurrents et possèdent toutes les deux un droit et intérêt légitime sur le nom NOBILIA.
4. L’enregistrement de mauvaise foi du domaine «<nobilia.eu>.
4.1. Remarques liminaires au regard de l’article 21 (3) b) ii) du Règlement CE N° 874/2004
La plainte est fondée sur l’article 21 (3) b) ii) du Règlement CE N° 874/2004 qui dispose qu’un des éléments démontrant la mauvaise foi peut être que :
"le nom de domaine n'ait pas été utilisé d'une façon pertinente dans les deux années au moins qui suivent la date d'enregistrement".
Cette disposition doit être appréciée en relation avec les termes de l’article 21 (1) précisant que "un nom de domaine est révoqué dans le cadre d’une procédure extrajudiciaire ou judiciaire appropriée, quand un nom de domaine enregistré est identique ou susceptible d'être confondu avec un nom sur lequel un droit est reconnu ou établi par le droit national et/ou communautaire, tel que les droits mentionnés à l'article 10, paragraphe 1, et que ce nom de domaine:
a) a été enregistré sans que son titulaire ait un droit ou intérêt légitime à faire valoir sur ce nom, ou
b) a été enregistré ou utilisé de mauvaise foi."
La réalisation d’un seul de ces critères pris individuellement est suffisant, ce qui constitue l’une des principales caractéristiques des procédures ADR et la distingue des procédures en application des règles de la Uniform Domain Name Dispute Resolution Policy (UDRP) pour les domaines génériques.
Dans l’hypothèse où la partie défendante n’a pas d’intérêt ou de droit légitime, le transfert du nom de domaine contesté peut être ordonné sans qu’il soit nécessaire de déterminer s’il existe ou non un usage pertinent du domaine. Aussi, il en est déduit que l’article 21 (3) b) ii) s’applique, que la partie défendante ai ou non un intérêt ou un droit légitime.
Cette thèse a été reprise dans le cadre de deux décisions du Centre d’arbitrage ADR à savoir <haug.eu> and <boltze.eu> (ADR décisions n° 05208 and n° 05231) où malgré l’existence de droits reconnus par le droit national détenu par les parties défendantes, le transfert des noms de domaine à été ordonné pour "défaut d’exploitation pendant au moins deux ans après leur enregistrement".
Dans l’affaire <Haug.eu>, la partie défendante n’avait mis en ligne qu’une simple page "ouverture prochaine" ("coming soon") et utilisait une adresse de courriel privée.
Elle n’a toutefois pas apporté la preuve d’un usage effectif et réel ne présentant qu’un seul courriel de "spam". Le Centre d’arbitrage a donc conclu à l’absence d’exploitation et ordonné le transfert du domaine.
Dans l’affaire <boltze.eu>, les faits étaient quasi identiques. L’absence d’exploitation a été confortée par la non utilisation d’adresses de courriel.
Dans une troisième affaire, l’affaire <precitec.eu> (Décision ADR n° 05266), le Tribunal indique que l’intervention de la linguistique dans l’application de l’article 21 (3) b) ii) pourrait expliquer l’interprétation stricte de cet article. En effet, dans le cadre des procédures <haug.eu> et <boltze.eu>, la langue utilisée est l’allemand. Or, les règles ADR en langue allemande diffèrent de celles en langue française ou anglaise. Pour la première "la mauvaise foi est démontrée"… et pour les deux autres, "la mauvaise fois peut être démontrée (may be demonstrated)".
La langue de procédure de la présente affaire est la langue française et par conséquent la décision du tribunal est prise sur la base de la version française des règles ADR.
Cependant, il convient de noter que ce texte, quel qu’en soit la langue, doit être interprété à la lueur des dispositions des règlements CE n° 733/2002 et CE n° 874/2004.
L’esprit des textes susvisés est la lutte contre les enregistrements frauduleux pour la protection des titulaires de droits protégés par les droits nationaux ou communautaire.
Reconnaître que l’absence d’utilisation pertinente d’un nom de domaine suffit pour obtenir le transfert dudit nom de domaine, d’autant plus que la partie défendante démontre détenir un intérêt ou un droit légitime, reviendrait à dire qu’il y existe une obligation d’usage attaché à un nom de domaine. Or, cette condition ne ressort d’aucun des textes précités si ce n’est dans le cadre d’enregistrements spéculatifs et abusifs.
En outre, si une telle obligation d’usage était établie, cela aurait un impact significatif pour les titulaires de domaine sous l’extension ".eu" y compris pour les titulaires de droits reconnus comme tels par les droits nationaux et la droit communautaire, qui n’exploitent pas nécessairement leur domaine au sens défini dans les affaires <haug.eu> et <boltze.eu>.
4.2 La partie défendant a t-elle enregistré le nom de domaine contesté de mauvaise foi ?
La partie requérante a fourni au Centre d’arbitrage ADR une copie d’écran datée du 15 juin 2009 pour démontrer l’absence de site web attaché au domaine contesté.
Si la partie requérante n’apporte pas de preuve irréfutable que le domaine <nobilia.eu> n’a pas été exploité au cours des deux années qui ont suivi l’enregistrement dudit domaine, mais uniquement à la date du 15 juin 2009, la partie défendante ne conteste pas l’absence de site web.
En revanche, la partie défendante apporte plusieurs éléments montrant un usage régulier du domaine <nobilia.eu> notamment par la présentation d’une page d’accès à un serveur de messagerie distant dit webmail sur une longue période selon ses dire mais remontant au moins à fin 2008 sur les documents fournis.
S’il apparaît pour l’internaute moyen qu’un nom de domaine se limite à une ou plusieurs pages web présentant des produits ou services d’une entreprises, il n’en demeure pas moins vrai qu’un nom de domaine peut être utilisé pour d’autres fonctions techniques qu’il permet. Ces fonctions peuvent être notamment l’utilisation d’un service de messagerie électronique, une accès sécurisé limité à certaine catégorie de personnes, ou encore un intranet réservé à une communauté précise (par exemple les salariés d’une entreprise). Dans une telle hypothèse le nom de domaine bien que non visible par l’ensemble des internautes doit être considéré comme étant exploité. Il va sans dire que l’exploitation "réservée" doit être démontrée comme a pu le faire la partie défendante dans le cas d’espèce.
L’arbitre estime que l’article 21 (3) b) ii) doit être apprécié au regard de sa rédaction précise à savoir que l’absence d’exploitation peut être une indication de mauvaise foi s’entend dans un contexte où le nom de domaine a été enregistré ou acquis "principalement pour vendre, louer ou transférer d'une autre façon le nom de domaine au titulaire d'un nom sur lequel un droit est reconnu ou établi par le droit national et/ou communautaire, ou à un organisme public", ou "le nom de domaine a été enregistré pour empêcher le titulaire d'un nom sur lequel un droit est reconnu ou établi par le droit national et/ou communautaire, ou un organisme public". Il appartient donc à la partie requérante d’apporter la preuve d’un tel enregistrement ou acquisition.
Or, dans le cas d’espèce, une telle preuve n’est pas apportée par la partie requérante qui limite sa démonstration à la non-exploitation du nom de domaine.
Si la partie défendante est informée des droits de la partie requérante depuis au moins 2006 (date de la première plainte déposée), il reste que les enregistrements de marque de chacune des parties visent des produits différents (ordinateurs, d’un côté, et meubles de cuisine, d’un autre côté). Les deux parties ne sont donc pas concurrentes, au vu des éléments fournis au Centre d’arbitrage ADR.
Il apparaît que la partie défendante n’a pas eu pour intention de vendre, louer ou transférer le nom de domaine contesté ou encore pour seul but d’empêcher la partie requérante d’utiliser ledit nom de domaine.
En conclusion, si la preuve d’une non-exploitation au cours d’une période de deux années d’un nom de domaine peut être une preuve cela ne peut être qu’une indication de mauvaise foi dans un faisceau d’indices. Il appartient à la partie requérante de démontrer en premier lieu la volonté de la partie défendant de perturber son activité. Ce qui n’est pas le cas dans la présente affaire.
Decision
Pour les raisons indiquées ci-dessus, conformément au § B12 (b) et (c) des Règles, le Tribunal a décidé de refuser les revendications de la partie requérante.
PANELISTS
Name | David-Irving Tayer |
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Date de la sentence arbitrale
2009-09-12